C'est la parution du troisième tome des aventures du détective caméléon, L’Ame de fond.

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Au premier tome, l’aventurier au physique de star de Bollywood, teint cuivré, cheveux en bataille et regard bleu Océan, avait fait une entrée fracassante dans notre vie de lecteur et dans celle de son acolyte, Thomas, ado parisien geek et grand lecteur de mangas et de romans d’aventure. Fracassante, au sens propre, puisque à la faveur d’une course-poursuite, il avait atomisé la vitrine des parents de Thomas, dans un déluge de verre brisé. En pourchassant l’homme en imperméable pour le forcer à payer les réparations, Thomas – et nous, lecteurs, par la même occasion – avions découvert un personnage exubérant, Soryan Nesh.

Le démolisseur de magasin, à la tête de L’Agence 100 visages, officine installée à Montmartre, est spécialisé dans les « enquêtes délicates, événements mystérieux, énigmes insondables… Lorsque toutes les autres solutions ont échoué. » Soryan Nesh n’a rien d’un détective ordinaire. La main droite carbonisée, enrubannée dans un pansement de momie, une cicatrice sur la pommette gauche en souvenir de ses aventures passées, l’Indien possède une botte secrète : une mallette remplie d’artefacts de grande valeur. Chaque objet, magique et numéroté, lui permet de prendre l’apparence d’un héros du passé, souvent issu des meilleures pages de la littérature. Une loupe et hop, un halo bleuté plus tard, Soryan a non seulement les traits de Sherlock Holmes, avatar numéro 8, mais aussi les géniales capacités de déduction de l’Anglais. Un fleuret, et c’est maintenant Cyrano de Bergerac, numéro 3, qui prend le relais. Soryan Nesh ne fait pas semblant, il devient vraiment « épéiste, mage, musicien, explorateur, danseur, marin, conteur… ». Il est tour à tour, dans le désordre et sans exhaustivité, Arsène Lupin, Quasimodo, Dracula, mais aussi Robinson Crusoé, le Baron Munchausen, Sinbad le Marin ou Prospéro.

100 visages, 100 avatars et autant de possibilités. Chaque plongée dans ses doubles de fiction lui laisse juste, au réveil, une désagréable migraine. L’auteur mêle les genres littéraires, polars, romans de cape et d’épée, théâtre, incorporant de nombreux passages écrits à la manière de Shakespeare, Swift, Daniel Defoe, Lovecraft, Victor Hugo, Goethe ou encore Maupassant. Les références aux grands classiques sont explicitées en fin de volume.

Le tome 1 nous avait entraînés dans une enquête métaphysique et policière dans le Paris des bas-fonds sur la disparition d’une jeune fille, avec un locataire fantôme, des spectres hargneux, une immense toile d’araignée électrique, des traumatismes enfantins, et les effrayantes apparitions littéraires du Horla et du docteur Faust.  Le deuxième tome nous avait aspirés dans une dangereuse affaire de succession familiale au Pays Basque, sur fond de  culte maudit de civilisations disparues, avec nébuleuse mauve, planète vivante munie d’yeux et de multiples bouches, magie noire, incendie et hommes pieuvres.

Le troisième tome est une ode aux récits de voyage et de piraterie. Dans le port de Lorient, Soryan Nesh, l’homme aux cent visages, rencontre Tobias Carlsson l’homme aux mille ennemis. Le vieux loup de mer, qui a navigué toute sa vie en eaux troubles, brisant les cœurs et volant les fortunes, veut réparer ses erreurs passées. Thomas l’ado est maintenant un membre à part entière de l’Agence 100 visages. Il n’a pas résisté au charme complexe de son charismatique employeur, pourtant « aussi buté et subtil qu’un ours des cavernes », et obscènement cupide. La présence aux côtés de l’acrobate lunatique de la jolie Alexandra, spirite spécialisée dans la recherche des âmes, défuntes ou non, n’y est sûrement pas pour rien. Ensemble, le trio, pisté par des assassins puis des robots exterminateurs, embarque pour Porto Allegre sur l’île africaine de São Tome, survit de peu à un violent rodéo maritime lors d’une apocalyptique tempête, avant d’échouer sur une île-cité du Pacifique vouée à la science, comme échappée de Gulliver et du Japon de Miyazaki.

Le quatrième tome est déjà sous presse : où nous entraînera donc Soryan Nesh, la prochaine fois ?