enfantillages !
Le magazine des livres pour enfants & ados qui s'écoute et qui se lit
Quelles nouveautés jeunesse ? Quel livre pour mon enfant, mon ado ?
Connaissez-vous enfantillages ?
C'est un magazine consacré à la littérature jeunesse présent sur les ondes, via une émission bimensuelle sur Fréquence Protestante - un mercredi sur deux à 14 heures - et sur les internets, via des podcasts sur les principales plateformes et un webzine. Enfantillages mêle des chroniques - dont celle du plus jeune journaliste littéraire de France, Rémi - des reportages sur tous les lieux où l'amour des livres résonne et des interviews de grands auteurs et illustrateurs : Susie Morgenstern, Albertine, Timothée de Fombelle, Grégoire Solotareff, Muriel Szac, Douglas Kennedy, Tahar Ben Jelloun... ils sont une cinquantaine à être venus parler de cet éblouissement des lectures enfantines.
Les coups de cœur d' Enfantillages !
Tout nouveau tout beau
11 novembre 2020
Et aussi sur anchor, apple podcast, spotify etc
on voyage dans l'espace, on réfléchit et on célèbre le girl power
Il
La Nuit est pleine de promesses
De Jérémie DECALF, éditions AMATERRA, dès 6 ans.
Aux confins de la science et de la poésie, sous une couverture noir mat constellée de milliers d’étoiles, aussi belle que son titre, La Nuit est pleine de promesses nous embarque dans un voyage intersidéral au-delà du système solaire. Elevons-nous sur les traces du Voyager Golden Record, ce disque d’or gravé des sons de la Terre transporté tout là-haut là-haut vers une potentielle civilisation extraterrestre. L’espace, et devant nous, la nuit, profonde, infinie. Infiniment consolatrice…
Le Flocon
De Bernard SANTINI, illustré par Laurent GAPAILLARD, éditions GALLIMARD, dès 6 ans.
« Scruter l’Univers, / Son ordre cosmique, Les Astres lointains,/ le Noir inconnu,/ Tel que nul œil humain ne l’a jamais vu », à travers une lunette d’astronome, la cour du roi du sublime conte de BS et LG s’y abîme quand paraît le mathématicien Johannes Kepler. Le découvreur des lois mathématiques qui régissent les planètes sur leur orbite ose, scandale, se présenter avec dans les mains « presque-Rien », juste l’un de ces flocons, qui sont, pour le jeune savant, « des lettres / Expédiées par le Ciel, / Messagers de la pensée des étoiles ». Un monde dans un flocon, l’infiniment grand, l'infiniment petit, cela augure-t-il d’une fin ou d’un commencement ? Le trait virtuose du dessinateur, ses lettrines ciselées font de ce livre une splendeur.
Respirus
DeRoberto PRUAL-REVIS, collection GIBOULEES, éditions GALLIMARD JEUNESSE, dès 7 ans.
Le voyage des abysses au fin fon de la stratosphère est accompli aller et retour par le poisson Respirus, en quête d’un espace vivable. Prodige de l’adaptation, il se voit pousser des jambes, des poumons, puis des ailes pour réaliser cette odyssée. Mais un irrépressible fou rire le prend alors et lui qui avait atteint la taille d’une petite lune, se dégonfle soudain comme une baudruche, balayant la surface du globe de son énorme souffle et le délestant au passage de « quantité d’objets superflus » générés par le genre humain. Une fable écolo aux multiples niveaux de lecture.
Ainsi parlait Nietzsche
De Nathalie et Christophe PRINCE, illustré par Yann DAMEZIN, éditions LES PETITS PLATONS, dès 9 ans.
Dix ans déjà que les Petits Platons racontent les philosophes aux enfants et mettent à leur portée la quintessence de leur pensée. Pour l’anniversaire, voici une adaptation du Livre pour tout le monde et personne, de Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra. Flanqué de son aigle et de son serpent, le Moustachu est le héros de cette fable joyeuse : il descend de sa montagne pour réveiller les hommes et leur apprendre à s’élever. « Comment peux-tu, demande-t-il au peuple « sans désir et sans flamme », « mépriser le monde, et penser qu’au-dessus du monde, il y a un arrière-monde, comme une arrière-cuisine ou une arrière-boutique, et que cet au-delà est beaucoup mieux que l’ici-bas ? (…) Mes amis, cessez de vouloir endormir votre souffrance ! (…) L’homme (..) doit être surmonté, pas anesthésié ». Le débat philosophique est lancé, par un titre particulièrement réussi, écriture habitée et illustrations de toute beauté.
Prenez le pouvoir, les filles !
De Jamia WILSON, illustré par Andrea PIPPINS, éditions CASTERMAN, dès 6 ans.
« D’abord on souffre, ensuite on se relève. » Tout est dit dans le titre de l’énergisant vade mecum de la flamboyante féministe américaine Jamia Wilson. Sois toi-même, trace ta propre route, passe à l’action et n’oublie pas la sororité : « je ne brille pas si tu ne brilles pas ».
Je veux un pain au chocolat !
De Jean-Luc ENGLEBERT, éditions PASTEL, dès 6 ans.
La petite princesse de cet album trace assurément sa route sans barguigner. Elle veut une chocolatine, euh… un pain au chocolat et elle l’aura ! Quitte à sacrifier sans l’ombre d’une hésitation sa chevelure de reine euh… de rêve.
Ta peau contre la mienne
De Rémi COURGEON*, éditions MILAN, dès 6 ans.
« Ma liberté faisait de l’ombre à sa bêtise. » « L’homme qui t’a tué en voulait à ma peau.(…) Sa peau, je la percerai à mon tour. » Comme les autres héroïnes nées sous la plume de Rémi Courgeon *, Nuée la petite Indienne se tient droite et reste fidèle au serment qu’elle a fait à son mustang noir. Elle préfère les chevaux aux humains : « aucun cheval n’est cruel ». Ce western au féminin comme en cinémascope est beau à couper le souffle. Le danger est partout, la tension palpable. On croit entendre les crotales siffler à chaque page…
* Rémi Courgeon était l'invité d'enfantillages !
Retrouvez notre entretien ici.
Rose Rage
D'Illana CANTIN, éditions HACHETTE, dès 14 ans.
La sororité, Rachèle l’apprentie journaliste la ressent pour la première fois quand Ameline est renvoyée du lycée. Un garçon lui a mis la main aux fesses en cours de gym. Elle lui a cassé la figure à la cantine. Et c’est elle qui a été renvoyée. Motif ? Elle l’aurait bien cherché, en postant sur Insta des photos d’elle dénudée. Mais la gronde des femmes de l’établissement, lycéennes donc mais aussi enseignantes et
« dames de la cantine », prend de l’ampleur. Il faut se bouger les filles : on ne peut pas laisser faire sans se trahir soi-même. C’est l’histoire d’un empowerment au quotidien.
Malala - L'Histoire de mon engagement pour le droit des filles
De Malala YOUSAFZAI, avec Patricia McCORMISCK, abrégé et adpaté par Sarah J. ROBBINS, traduit de l'anglais parMichel LAPORTE, éditions LE LIVRE DE POCHE JEUNESSE, dès 9 ans.
Elevée par un père enseignant, persuadé qu’elle serait un jour Premier ministre, mais aussi une mère très pieuse, et respectueuse du purdah, la séparation entre femmes et hommes, Malala a vu sa vie de collégienne pakistanaise basculer le 9 octobre 2012, quand un taliban lui a tiré dessus à bout portant. Ces fous de Dieu « poussaient comme de la mauvaise herbe » dans sa belle et paisible vallée du Swat. Ils ont voulu museler la brillante et charismatique élève qui s’était élevée contre leur montée en puissance, et pour l’éducation et la paix, très vite relayée par les médias du monde entier, Times et BBC en tête. Ils ont réussi à jeter « une ombre noire sur (son) enfance ensoleillée » mais n’ont pas bâillonné la plus jeune lauréate du prix Nobel de la paix, qui ne s’est jamais départie de sa foi, convaincue qu’elle demeure que « Dieu envoie d’abord la solution, et ensuite, le problème »…
Résistance
De Samira AHMED, traduit de l'anglais (Etats-Unis), collection Big Bang, éditions BRAGELONNE, dès 14 ans.
Malala, l’héroïne pachtoune est évidemment un astre pour Layla et les autres personnages du roman, brusquement arrachés à leur vie rêvée d’ados californiens pour être internés sur ordre du président des Etats-Unis parce que musulmans. « Il n’y a jamais eu de démocratie qui ne se soit pas suicidée » disait Samuel Adams, l’un des Pères fondateurs du pays. Selon un processus désormais rodé, le « délire fasciste de haut niveau » a commencé par un recensement, bientôt suivi de licenciements et d’autodafés mais les citoyens musulmans, présents sur le sol américain depuis l’arrivée des premiers esclaves sur le continent, n’ont pas pu y croire. Un clic sur l’appli Signal pourtant, et votre voisin vous dénonce, vous expédiant à Mobius, le camp d’internement installé à deux pas de Manzanar, le stalag version US où 120 000 Nippo-Américains arrêtés en 1942 du seul fait de leur origine, croupirent jusqu’à l’armistice. Mais comme Sophie Wohl, cette étudiante berlinoise qui osa défier les nazis, Layla et ses amis se soulèvent, la barbarie n’ayant pas réussi à éteindre leur espoir aussi têtu que la beauté des paysages californiens où l’innommable se produit. Samira Ahmed a situé sa fiction deux ans et demi après la présidentielle. Alors que Kamala Harris, la nouvelle vice-présidente américaine partage la même origine desi que Layla, par sa mère indienne, on se dit que peut-être, on eu vraiment chaud.
Ginette Kolinka Survivante du camp de Birkenau
Adapté de Retour à Birkenau de Ginette KOLINKA, avec Marion RUGGIERI, éditions RAGEOT, dès 14 ans.
Comme le camp de Mobius dans Résistance, la Croix-Rouge avait visité le camp modèle de Terezin et validé la propagande nazie. Ginette Kolinka, la petite parisienne arrachée à sa jeunesse insouciante un matin ensoleillé de mars 1944 et déportée pour Pitchipoï, pour perpète, y a transitée dans son long chemin de souffrance dans ces camps de la mort où « chaque ordre est un coup ». La mère du batteur de Téléphone avait 20 ans et pesait 26 kilos quand elle en est rentrée. Elle témoigne, inlassablement, sur l’indicible. Son récit, suivi d’un solide dossier en annexe, est insoutenable mais indispensable.
Le Tournesol est la fleur du Rom
De Ceija STOLKA, illustré par Olivia PAROLDI, collection Poés'Histoires
traduit de l'allemand par François MATHIEU, éditions BRUNO DOUCEY, dès 8 ans.
Cet enfer, la poétesse Ceija STOLJKA l’a connu aussi. Déportée alors qu'elle n'était encore qu'une enfant parce que Rom, elle écrit « Auschwitz est mon manteau, / Bergen-Belsen ma robe / et Ravensbrück mon tricot de peau / de quoi faut-il que j’aie peur ? ». Mais elle a choisi de « respirer profondément dire / Oui à la vie » car « Nous (les Roms) sommes un peuple qui dans le désespoir sait chanter et danser » et sa poésie nous fortifie.