La première scène pose une énigme inquiétante. Un petit garçon, Charly et sa grand-mère, Dame Mélisse, cuisinent dans la douceur du petit matin. L’aïeule, vrai cordon bleu mais aussi ensorceleuse de premier ordre, « rayonnante d’intelligence » et admirée de tous, pratique la cuisine magique, un grimoire à la main. Farine, beurre, sucretincelle, le duo invente les « choco-beignets de prédiction, pour petits présages sans prétention ». On rompt le beignet et, hop, la pâte libère un oracle sur petit papier. Mais à l’instant où Grand-Ma croque son beignet et lit la prédiction qui est dedans, tout bascule. Elle se volatilise et sort aussitôt de la vie de Charly, son petit-fils. Sa disparition dure cinq ans.

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Charly a maintenant 14 ans et vit à Aix-en-Provence avec sa mère. Un coup de fil vient de les informer du retour de Dame Mélisse. Mais la fière grand-mère est méconnaissable. Elle n’est plus que l’ombre d’elle-même. C’est une misérable vieillarde sale, dépenaillée et amnésique. La grande magicienne a été mitardisée, c’est-à-dire que sa mémoire et ses pouvoirs lui ont été ôtés. Principal suspect : un Cavalier noir psychopompe et armé d’une faux assassine. La grand-mère terrorisée ne cesse de rabâcher son nom, en ajoutant qu’elle n’a plus les moyens de le payer. Que s’est-il passé cinq ans plus tôt ? Quel était le message du beignet de prédiction ? Comment rendre sa dignité et ses souvenirs à Dame Mélisse ? C’est l’objet du premier tome de Magic Charly. L’ado au sourire irrésistible n’est pas tout seul. Il a comme alliés June, l’héritière des fameux calissons d’Aix, rebelle et as des bêtises qui prend la vie du bon côté « parce que la légèreté est la seule chose qui se place entre nous et le désespoir », son exact contraire Sapotille, la surdouée solitaire, pour qui la joie est « un sentiment aussi précieux que rare », Mandrin, le chat blanc caractériel qui joue les GoPro reliées par télépathie, et Maître Lin, magicier d’élite et propriétaire très coquet d’un salon de thé qui est la couverture idéale pour un réseau clandestin.

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Car Charly a vite compris que deux mondes parallèles cohabitent à Aix. A côté des quiétons, les non initiés, qui vivent dans la jolie ville provençale, se déploie l’univers des magiciers, avec les inévitables balais volants, objets animés, chapeaux sans fond et grimoires mais aussi une sinistre Académie qui règne sans partage grâce à une milice ultra violente. Dans ce monde, Charly est un Patouilleur, un apprenti sorcier. Avant d’avoir fêté ses vingt et un ans, il devra réussir le très sélectif diplôme d’Elémenter. Sinon, adieu la magie : un virus se chargera de le confiner à jamais  dans le monde des quiétons s’il ne l’a pas tué !

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Inutile d’idéaliser le monde des sorciers : il est, comme le nôtre, « essentiellement bâti sur le rapport de forces ». La noire allégorie de la mort, obsessionnelle dans les paroles de la grand-mère de Charlie, rôde, insistante, sous la figure du cavalier noir à la gigantesque faux. On évoque un trafic de magie, et une jeunesse dorée, qui multiplierait les délits en gaspillant la magie volée aux apprentis. Aucun risque pour ces fils à papas d’être expédiés à Saint-Fouettard, l’effrayante maison de redressement de Thadam, la capitale des magiciers, où l’on finit au moindre faux pas. C’est justement le cas de Charly et ses amis, qui s’y retrouvent enfermés au deuxième tome, alors que leur initiateur, Maître Lin, est jeté aux oubliettes dans un labyrinthe secret et cerné de ronces. Saint-Fouettard est dirigé par un psychopathe entouré de reptiles qui systématise l’humiliation des plus faibles en leur disant : « ça me fait plus de mal à moi qu’à toi ».  Mais Charly découvre peu à peu qui il est et rentre dans la résistance.

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Ce roman touffu, bien écrit et souvent très drôle cache, sous sa magnifique couverture en relief, un univers aussi fort que les séries best sellers à la Harry Potter. Avec en plus une entêtante quête d’identité et l’exploration sensible des rouages de la mémoire et de la culpabilité.